Télétravail, les entreprises font marche arrière

Depuis la pandémie de Covid-19, le télétravail a révolutionné la manière dont de nombreux employés néo-zélandais mais aussi dans le monde entier, notamment dans le secteur public, abordent leur quotidien professionnel. Cependant, un changement de cap semble se profiler à la suite des annonces de la ministre de la Fonction Publique Nicola Willis. Les agences publiques devront dorénavant justifier les accords de télétravail, tout en veillant à ce que ces arrangements ne compromettent ni la performance des employés ni les objectifs de l’organisation. La question se pose alors : assistons-nous à la fin du travail à domicile en Nouvelle-Zélande ?

 

Une tendance à la fin du télétravail ?  

La flexibilité du télétravail a longtemps été une norme dans de nombreuses entreprises, surtout après 2020. Cependant, les récents développements suggèrent que cette pratique pourrait être remise en question. Selon Peter Kiely, expert en droit du travail, les employés pourraient être contraints de revenir au bureau si leur contrat ne stipule pas clairement la possibilité de travailler à distance. Les entreprises ont le droit d'imposer cette décision si le télétravail n'est pas un accord formel. Ainsi, les employeurs peuvent exiger le retour au bureau, sauf si un arrangement contractuel stipule explicitement le contraire.

Cela étant dit, Toni Jacka, consultante en ressources humaines, avertit que tout retour précipité au bureau pourrait avoir des effets négatifs sur l'engagement des employés, en augmentant le taux de rotation et en diminuant la motivation. La clé pour les entreprises est de trouver un équilibre entre productivité et bien-être des employés, surtout lorsque les accords de télétravail sont devenus la norme pendant plusieurs années.

 

Réorganiser le télétravail 

Comme dans de nombreux pays, la Nouvelle-Zélande voit le débat sur le télétravail évoluer. Si certaines entreprises envisagent un retour complet en présentiel, d'autres cherchent plutôt à structurer davantage la pratique du télétravail pour mieux en contrôler l’usage tout en renforçant la collaboration. En effet, les interactions informelles au bureau, souvent cruciales pour l'efficacité des équipes, sont difficiles à reproduire à distance. Un retour partiel au bureau pourrait donc améliorer la cohésion et les échanges, sans pour autant éliminer la flexibilité dont bénéficient les employés.

Lors de la crise sanitaire, de nombreuses entreprises avaient signé en urgence des accords sur le travail hybride. Ces dispositions, souvent floues, permettaient aux salariés de travailler de la maison en prenant la décision le jour même, perturbant parfois la coordination dans les équipes, notamment dans des domaines comme la gestion de projet ou les ressources humaines. Benoît Serre, ex-DRH de L’Oréal, souligne que l'absence de contacts réguliers nuit inévitablement à la dynamique collective : les « discussions de couloir », plus spontanées que les échanges numériques, sont souvent essentielles. Il estime qu'il ne s'agit pas de limiter les droits des salariés, mais de réorganiser le télétravail de manière plus structurée.

Des entreprises telles que Publicis ou Amazon ont déjà instauré des jours obligatoires de présence au bureau. En Nouvelle-Zélande, cette tendance pourrait suivre dans des secteurs où la collaboration physique reste incontournable.

 

Quel avenir pour le télétravail en Nouvelle-Zélande ?

Ces dernières années, la flexibilité est devenue un élément de la vie professionnelle des employés du secteur public. Depuis 2020, la Commission du service public prévoit une approche flexible par défaut dans son guide réformant le télétravail. Elle stipule que tous les rôles sont présumés flexibles, sauf s’il y a une véritable raison professionnelle pour que le rôle ne le soit pas.

Toutefois, des changements se profilent à l'horizon puisque la ministre de la fonction publique Nicola Willis a récemment annoncé des mises à jour des directives, visant à clarifier que le télétravail n’est pas un droit automatique. La ministre a ainsi demandé au commissaire de la Fonction publique de renforcer plusieurs points clés :

  • Le télétravail doit être le fruit d’un accord formel entre l’employé et l’employeur.

  • Ces accords ne peuvent être validés que s'ils ne nuisent pas aux performances ou aux objectifs de l’agence.

  • Les agences doivent surveiller et évaluer régulièrement l’impact de ces arrangements et fournir des rapports à la Commission de la fonction publique sur leur utilisation.

 

Pourtant, de nombreux employés du secteur public se sont adaptés à cette flexibilité instaurée depuis quatre ans, réorganisant leur vie en conséquence. Certains ont déménagé plus loin des centres-villes, tandis que d'autres ont pris des engagements personnels, s’appuyant sur la stabilité du travail hybride. Il sera donc délicat de revenir à un modèle en présentiel sans tenir compte de ces réalités, d’autant que de nombreux employeurs ont ajusté leurs politiques pour s’aligner sur ces pratiques.

Dans de nombreux cas, les modalités de télétravail ont été formalisées et inscrites dans les contrats ou conventions collectives, souvent négociées avec succès par les syndicats. Les employeurs publics exigent généralement un accord formel si un employé travaille à distance plus de deux jours par semaine.

 

Pour résumer, les nouvelles directives visent à clarifier que le télétravail n’est pas un droit inné et à l’encadrer davantage. Toutefois, tout changement devra être mis en œuvre progressivement, en prenant en compte la dépendance des employés vis-à-vis de ces accords flexibles. Bien que certaines agences publiques envisagent de limiter cette pratique, le télétravail ne semble pas destiné à disparaître totalement.